Samedi 4 janvier 1975:
La colère qui gronde au Sud:
Taybé, 3 janvier (de notre envoyé spécial Rudolf el-Kareh):
"Les mots n'ont plus de sens. Ce sont des armes qu'il nous faut. Dites-leur de nous donner des armes". Les mots sont inutiles? C'est presque vrai. A force d'écrire et de "décrire le Liban-Sud après les agressions", on se demande en définitive à quoi sert-il de montrer aux "gens de Beyrouth" la barbarie israélienne si rien ne vient empêcher l'ennemi de semer la mort dans les villages du Sud.
Après tout, ce qui s'écrit depuis 4 ans sur le Sud a-t-il pu changer quelque chose?
Nabatiyeh hier avait le même aspect qu'en cette journée de 1972 où les avions ennemis s'étaient acharnés sur sa banlieue tandis que les chars sionistes envahissaient une bonne partie du "secteur central" à partir de Yaroun et Bint-Jbeil: des rues pratiquement vides, un sérail déserté, des habitants terrés chez eux et quelques familles qui pleurent leurs morts.
A partir des collines surplombant Adaisse, les israéliens s'acharnent par intermittence sur le chef-lieu du caza. Une distance de 12 Km à vol d'oiseau sépare les lignes ennemies de la localité. Une cible facile sur laquelle on tire au jugé. Mercredi, c'est miracle s'il n'y a pas eu plus de victimes. Les obus sont tombés dans des vergers et la terre mouillée a amorti les explosions. Ce qui est le plus terrible, c'est cette mort qui frappe au hasard. On espère toujours que l'obus est pour le voisin. Terrible et inhumain espoir!